Octobre est le mois de la sensibilisation au TDAH (trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) et j’ai eu la chance de pouvoir poser les questions que j’avais à la neuropsychologue Dre Johanne Lévesque.
Qu’est-ce que le TDAH?
C’est un trouble qui se caractérise par une difficulté à porter attention pendant un certain temps. Environ 8% des enfants seront atteints de ce trouble qui les rend impulsifs, inattentifs et parfois hyperactifs. Dans certains cas l’enfant n’est pas capable de rester inactif, il ressent le besoin constant de bouger. L’inattention se ressent à la fois pour écouter, regarder ou pendant la lecture.
À partir de quel âge le diagnostic peut-il être établi?
Le diagnostic peut être établi à partir de 6 ans. C’est le pédiatre ou le médecin de famille qui le fait, mais de plus en plus réfèrent à des neuropsychologues afin d’avoir une évaluation plus poussée pour s’assurer d’un bon diagnostic et que le trouble d’attention ne soit pas dû à d’autres facteurs. Dès l’âge de 3-4 ans, les parents peuvent avoir des soupçons lorsqu’ils remarquent que leur enfant a une agitation anormale au niveau moteur. Par contre lorsque le trouble n’inclut pas l’hyperactivité, il peut plus facilement passer inaperçu et être remarqué seulement au niveau primaire où les enseignants verront que l’enfant est souvent dans la lune, qu’il décroche facilement, ne se rappelle pas des tâches demandées, etc.. Plus de garçons souffrent de la composante avec hyperactivité et plus de filles sans.
Est-ce qu’il y a plus de cas qu’avant ou c’est simplement plus diagnostiqué qu’avant?
C’est un mélange des deux. Il y a effectivement plus de cas que par le passé et les cas sont en augmentation constante, mais le diagnostic est plus vite identifié et posé de nos jours, car les intervenants en petite enfance sont plus outillés, ont plus de connaissance sur le sujet que dans le passé.
À quoi est dû le TDAH? Est-ce seulement génétique ou il y a des facteurs externes?
L’hypothèse la plus forte est celle de la génétique où des gènes qui assurent la régulation de la dopamine (un neurotransmetteur), entre autres, seraient déficients. Par contre il n’y a pas que la génétique qui est en cause et certains facteurs externes comme l’exposition à des composés chimiques peuvent contribuer à l’apparition du TDAH de même que les drogues et l’alcool consommé par la mère durant la grossesse.
Quel est le traitement ?
Tout d’abord il faut offrir à l’enfant un cadre structuré, une routine claire et constante et l’aider,au besoin, à développer ou améliorer ses habiletés sociales. Car comme certains enfants sont impulsifs cela peut amener des conflits avec les pairs et ils ont besoin d’être mieux outillés dans leur approche avec l’autre et cela peut être fait avec l’aide d’un éducateur spécialisé ou d’un psychologue. Les enfants atteints de TDAH réagissent bien aussi à un système de récompense-privilège, car lorsqu’ils sont heureux ils sécrètent davantage de dopamine, le neurotransmetteur qui est déficient dans le TDAH. En vieillissant, les adolescents pourront trouver des motivations qui sont davantages intrinsèques, savoir qu’il va réussir son examen s’il se concentre pour étudier par exemple.
Un autre aspect du traitement est la médication tel que le méthylphénidate (Ritalin) qui va aller augmenter l’activité de la dopamine. Selon Dre Lévesque, la médication ne devrait pas être utilisée seule, car il s’agit d’une minorité d’enfants qui vont mieux se porter seulement avec la médication sans avoir d’effets secondaires. Une étude sur le long terme effectuée sur 10 ans avec 4 groupes d’enfants dont un groupe avait seulement la médication, un groupe seulement une thérapie cognitivo-comportementale, un groupe où l’on combinait médication et thérapie cognitivo-comportementale et un groupe rien du tout, a démontrés que le type de traitement utilisé au départ ne pouvait pas permettre de conclure lequel de ces groupes fonctionnerait le mieux 10 ans plus tard. C’est plutôt une bonne réponse à un traitement, peu importe lequel, et des facteurs environnementaux comme le contexte sociodémographique, qui sont les meilleurs prédicteurs d’un bon pronostic. Parfois la médication peut rendre l’enfant plus neutre et lors de la crise de l’adolescence ces derniers sont tentés d’arrêter leur médication, car ils désirent se sentir davantage eux-mêmes et c’est là qu’il y aura un problème si rien d’autre n’a été fait pour outiller la personne avec son TDAH.
Le neurofeedback est un autre traitement disponible qui consiste à un entrainement du cerveau à mieux se concentrer. Une électrode est placée sur la tête de l’enfant et il doit tenter de se concentrer et être attentif et grâce à un feedback visuel ou auditif (une chanson ou une animation) l’enfant est capable de voir s’il se concentre adéquatement et on est capable de l’aider à savoir quand il le fait correctement. Il faut environ 40h de traitement pour arriver à des résultats intéressants. Jusqu’à maintenant, les études publiées sur l’effet à long terme du neurofeedbcack ont montré que les améliorations obtenues grâce à cette méthode sont permanentes si l’entraînement est bien fait vs la médication où les améliorations vont cesser en même temps que la cessation de la médication. L’efficacité du neurofeedback est la même que la médication selon les pédiatres américains, mais prend du temps à apparaître. Il est important que ce traitement soit fait par des professionnels de la santé formés adéquatement pour le faire soit par des neuropsychologues.
Quelles sont les ressources disponibles pour les parents ?
Il existe des associations ou organismes pour venir en aide à la famille touchée par le TDAH, que ce soit par du répit, des groupes d’entraide, de l’enseignement, etc. Il existe les associations panda et aussi l’Institut des troubles d’apprentissage.
Un gros merci à Dre Johanne Lévesque de la clinique Neurodezign d’avoir prit le temps de répondre à mes questions. Dre Lévesque est neuropsychologue et elle pratique le neurofeedback dans sa clinique. Elle a été la première en 2002 a l’introduire au Québec bien que cela existe depuis les années 60 aux États-Unis, suite au postdoctorat qu’elle a fait sur ce sujet. Ce projet lui a d’ailleurs valu un prix international offert par la Foundation for Neurofeedback and Applied Neuroscience.