Vie de famille

L’été en campagne ou passer de 100 à 10km/h

L’été en campagne ou passer de 100 à 10km/h - Marginale et heureuse

Quand arrivent les matins d’été, papa Ours se lève pour gagner la gare de train vers le centre-ville de Montréal. Des jobs comme la sienne, il n’y en a pas par chez nous. Quant à moi, maman Ourse, je vais conduire les trois grands aux deux fermes où ils ont été engagés;

Une ferme porcine familiale où on apprend à prendre soin des animaux, à les laver et à les nourrir, puis à conduire un tracteur et un camion pour s’occuper du terrain;

Une ferme maraîchère où on cueille des fraises et des framboises et où même maman Ourse donne parfois un coup de main au kiosque, lors des fins de semaine occupées des épluchettes de maïs.

L’été en campagne, c’est sept jours sur sept et pas moyen d’être loin de la maison parce qu’on ne sait jamais à quelle heure la journée de travail se termine sur une ferme ou quand les grands auront besoin de maman taxi. L’été chez nous est rythmé par les congés grâce à la pluie ou les rushs dus aux naissances de petits cochons roses. Les journées s’étirent un brin au mois de juin et raccourcissent tranquillement au fur et à mesure que juillet et août s’égrainent. On sent les minutes de plus ou de moins; on les vit.

On passe à travers la terrible invasion des maringouins, des brûlots, des frappe-abords et des mouches à cheval au même rythme qu’on passe à travers les semaines de confitures de fraises et rhubarbe, les canicules, les semaines des bas coupés qui servent à protéger les bras contre les framboisiers, les journées pluvieuses, les semaines de confitures de bleuets, les semaines venteuses et les interminables week-ends d’épluchettes de maïs, jusqu’au retour à l’école.

Pour les petits oursons, la motivation pour arroser les 22 boites à fleurs, le potager, les framboisiers, les plans de fraises et de bleuets est à son paroxysme, pendant, disons, le premier tiers de l’été. Puis, mi-juillet, ils le sont un peu moins, mais le font quand même juste avant que la visite arrive. On sort parfois les fusils à eau pour augmenter la motivation pour les sciences de la botanique. Et fin août, on finit par les trouver bons d’y avoir simplement pensé, mais on le fait souvent à leur place. C’est zen de passer du temps avec un arrosoir, dans le fond.

Les oursons se font aussi des scénarios avec les amis qui viennent à la maison, ils font des villages et des constructions avec des bouts de bois dans l’immense carré de sable, ils courent avec les chiens, jouent au badminton ou au volleyball, attrapent des bibittes avec des pots Mason, se défient au Mölkky ou font une des 50 missions à réaliser avant la fin de l’été. Ils rentrent plein de sable, roses de chaleur et du gazon sur les genoux.

Dans mon entrée, on peut rouler jusqu’à 50 km/h, sur un mélange de gravelle et de plantain. C’est aussi là, en plein milieu de la cour, qu’on sort des matelas et des chaises longues le 12 août, pour le soir des étoiles filantes. Les enfants ont appris à faire du bicycle dans la roche! Quand on leur permet de rouler sur l’asphalte, c’est comme si on leur faisait conduire une Cadillac. Le bonheur est parfois si simple.

On a bâti notre maison des 7 ours avec un genre qui fait que les gens pensent qu’on habite une vieille dame centenaire. On lui a mis une galerie tout le tour avec des lilas, des rosiers et une corde à linge pleine d’épingles qui rondit un peu entre chaque poteau. Les jours d’été de grand lavage, il y a des vêtements ou des draps tout le tour de la maison. On a l’air d’habiter une cabane d’enfants géante faite avec des nappes et de la literie trouvée dans l’armoire par les petits.

Ce qu’il y a de formidable à vivre en campagne, c’est le moment où tout le monde est de retour à la maison pour le souper; on mange sous un ciel flamboyant de coucher de soleil, on se baigne, le vent tombe et on veille, pas tard, au bord du feu de camp. Quand le Bon Dieu du ciel a fini d’allumer toute la Grande Ourse et que les lucioles clignotent, c’est l’heure d’aller se coucher.

La première série de romans que j’ai reçue en cadeau est celle de Marie Laberge, Le goût du bonheur. Dans cette histoire, on parle de la maison de campagne avec élégance et l’esprit des vacances; une belle sieste d’après-midi avec le chaud vent qui fait valser les rideaux de coton blanc.

J’ai cette belle image romantique, mais parfois aussi l’impression d’être dans la chanson qui dit : « On va se creuser un trou, perdu quelque part au bout du monde; on n’aura pas d’argent, on fera pousser des enfants ». Je parle bien plus souvent à mes voisins par Facebook qu’en vrai. Une chance qu’on a les réseaux sociaux!

Fait que c’est à ça que ça ressemble, nos étés en campagne. On ne voyage pas vraiment parce que les enfants sont dans la haute saison de travail, mais on a l’impression de vivre dans notre maison de vacances, un chalet de campagne, à l’année. Franchement, papa Ours, je trouve que notre caverne, on l’a faite à la bonne place. Après tout, Montréal n’est pas bien bien loin quand on est tannés d’être dans notre coin.

Vous autres, êtes-vous de l’ile ou de l’autre bord des ponts et des tunnels, comme nous?

Stéphanie MacFred Lauzé

Stéphanie habite en campagne avec son conjoint, leurs quatre garçons et leur fille. Enseignante et auteure, elle est à la maitrise en orthopédagogie à l’UQÀM et fait l’école à la maison. Elle travaille pour mettre sur pied un centre d’ateliers pour aider les enfants à être des géants en apprentissage, en pleine conscience, en lecture de millions de livres sur toutes sortes de sujets, en conceptualisation de robots, en création de potagers… jusqu’à la lune. Stéphanie adore la littérature, le hygge, les maths, les étoiles et l’hiver. Elle partage ses intérêts sur Facebook avec La petite école à la maison, le Centre pour enfants Grande Ourse et Mon hygge en pots Mason.

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